A qui appartiennent vos données ?

Une exploration de la propriété des données à l’ère numérique.

Dans notre société hyperconnectée, la question de la propriété des données est devenue essentielle. Alors que nous produisons et partageons constamment des informations, comprendre à qui appartiennent réellement ces données est crucial pour naviguer dans le monde numérique moderne.

Propriété des données : un concept flou

La notion de propriété des données est ambiguë. Contrairement aux biens physiques, les données ne bénéficient pas d'un statut de propriété clair. Comme le souligne un article du Harvard Law Review, le cadre législatif entourant la propriété des données est encore en développement, avec des variations significatives d'une juridiction à l'autre (Smith, J., 2021).En Europe, le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) reconnaît les "personnes concernées" comme étant propriétaires des données personnelles qu’elles produisent. Cependant, comme le note le professeur Paul De Hert de la Vrije Universiteit Brussel, cela ne se traduit pas par un droit de propriété exclusif mais plutôt par un ensemble de droits d’accès, de rectification, et de portabilité (De Hert, P., & Gutwirth, S., 2018).Aux États-Unis, l'absence d'une loi fédérale unique sur la protection des données a conduit à une approche fragmentée, où la propriété des données dépend souvent des accords contractuels entre les parties. Une étude parue dans le Yale Journal of Law & Technology met en lumière les défis posés par cette fragmentation, soulignant la nécessité d'une législation plus cohérente (Jones, L., 2020).

L'influence des géants du numérique

Les grandes entreprises technologiques, telles que Google et Facebook, jouent un rôle majeur dans la collecte et le contrôle des données. Ces entreprises se considèrent souvent comme les "gestionnaires" des données qu'elles collectent, un point de vue qui soulève des questions éthiques et juridiques substantielles, comme l'indiquent les travaux de la sociologue Shoshana Zuboff, professeure émérite à Harvard, sur le capitalisme de surveillance (Zuboff, S., 2019). Selon elle, ces entités ne se contentent pas de surveiller le comportement des utilisateurs, mais elles exploitent également les données pour renforcer leur pouvoir de marché. ; plus d'informations sur https://www.zulma.fr/livre/lage-du-capitalisme-de-surveillance/. Pour répondre à ces défis, des mouvements pour une plus grande appropriation personnelle des données ont émergé. Des initiatives comme le projet Solid de Sir Tim Berners-Lee, le père du World Wide Web et du HTML, qui visent à redonner aux individus le contrôle de leurs données personnelles en utilisant des technologies décentralisées, offrent un modèle prometteur (Berners-Lee, T., 2020) ; plus d'informations sur https://solidproject.org/. D'autres initiatives ne sont plus à l'état de projet mais sont bel et bien devenues une réalité et même des alternatives compétitives à l'image de Nextcloud, une solution utilisées notamment par la Ville de Genève, le Ministère de l'Intérieur français, le ITZBund du gouvernement fédéral d'Allemagne, la Sorbonne et tant d'autres organisations privées et publiques ; plus d'informations sur https://nextcloud.com/whitepapers/. Le phénomène de "vendor lock-in" ou le verrouillage des fournisseurs, où les clients deviennent dépendants d'un fournisseur unique pour des produits ou services et sont incapables de passer facilement à un fournisseur concurrent sans coûts substantiels, pose un problème considérable dans le paysage technologique actuel. Parmi les acteurs majeurs souvent associés à cette problématique, on retrouve Microsoft, AWS, Google et Oracle. Ces entreprises fournissent des écosystèmes intégrés où les outils et services sont optimisés pour fonctionner ensemble, mais souvent au détriment de l'interopérabilité avec d'autres systèmes.Lorsqu'une organisation s'engage avec un fournisseur particulier, elle investit non seulement dans ses produits, mais également dans un savoir-faire, une intégration technologique, et parfois même dans une formation spécialisée de son personnel. Selon une étude publiée dans le Journal of Information Technology Management, ces engagements peuvent entraîner une augmentation des coûts opérationnels à long terme et limiter la capacité d'une entreprise à innover ou à adopter de nouvelles technologies (Brown, T., & Wilson, S., 2021).

Des solutions open source comme alternative

Les solutions open source émergent comme une alternative viable au vendor lock-in, offrant une flexibilité inégalée et un contrôle accru aux utilisateurs. Contrairement aux systèmes propriétaires, les logiciels open source comme Nextcloud, Linux, ou Apache permettent aux organisations de personnaliser et de modifier le code source en fonction de leurs besoins spécifiques. Cette latitude non seulement réduit la dépendance à un fournisseur unique, mais encourage également l’innovation collaborative, comme l’explorent les chercheurs de l’Université de Maastricht dans leur étude sur l’adoption des logiciels open source (Van Der Aalst, W.M.P., 2019).En adoptant des solutions open source, les entreprises peuvent atténuer les risques associés au vendor lock-in tout en bénéficiant d'autres avantages stratégiques :

  • Interopérabilité et flexibilité : Elles sont conçues pour s'intégrer avec diverses technologies, facilitant la transition entre systèmes.
  • Coût-efficacité : Sans frais de licence coûteux, elles minimisent les coûts initiaux et permettent des mises à jour collaboratives.
  • Sécurité et transparence : Leur nature ouverte permet une évaluation continue par la communauté, assurant une détection et une correction rapides des vulnérabilités.

Plus d'information sur Qu'est que l'open source ?

Conclusion

La propriété des données et le choix des technologies sont des questions centrales dans l'économie numérique d'aujourd'hui. En optant pour des solutions open source, les entreprises peuvent se protéger contre le vendor lock-in, renforcer leur sécurité et stimuler l'innovation. Tandis que les géants du numérique continueront d'évoluer, les solutions ouvertes, soutenues par une communauté active, offrent un chemin sûr vers l'indépendance numérique et l'autonomie des utilisateurs. En comprenant à qui appartiennent réellement vos données, vous pouvez mieux naviguer dans ce paysage numérique complexe et en constante évolution.